A l’approche des Journées du patrimoine, cet atelier thématique se propose de créer son petit Panthéon personnel, d’imaginer, avec plus ou moins de férocité la propagande touristique de demain, ou encore de revendiquer une vision quelque peu « divergente » de l’histoire de l’art.
L’occasion de s’amuser un peu avec nos classiques.
Première partie:
Support : Les Phares, Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal (1857)
Proposition d’écriture: Sous la forme d’une série plus ou moins longue de petits paragraphes de trois à quatre lignes, lister ses admirations (ou ses mépris) littéraires; célébrer (ou dénigrer) les auteurs en reprenant la structure du poème de Baudelaire. Commencer chaque paragraphe par un nom, puis y accoler plusieurs appositions en tentant de développer une métaphore pour chacun. Cette image doit représenter une vision personnelle de l’univers de cet auteur ( différente des qualités et caractéristiques qui lui sont d’ordinaire attribuées, ou non). Afin de conserver une unité au poème , il est préférable de choisir les métaphores dans une même catégorie (lieu, monde végétal ou animal…).
Deuxième partie:
Support: un prospectus des « Journées européennes du Patrimoine » édité par la ville de son choix.
Proposition d’écriture: Imaginer le prospectus des Journées du Patrimoine de 2050, en s’inspirant des différentes rubriques du modèle proposé. Imaginer la toponymie, l’héritage culturel et architectural considéré comme digne d’intérêt, les choix et l’état de conservation des bâtiments, les œuvres exposées et les animations proposées…
Cette proposition d’écriture n’inspire pas immédiatement tous les participants. Le choix d’un modèle à la fois simple et suffisamment détaillé est important pour constituer une base. En fonction du monde imaginé en 2050, on peut proposer une simple transposition de chaque partie du prospectus, et fournir un exemple.
Troisième partie
Support: Des Papous dans la Tête: Les Décraqués – L’Anthologie, coll., Ed. Gallimard (2004), p 215- 217 ; reproductions de plusieurs chefs-d’œuvre extrêmement célèbres
Petit emprunt aux »décraqués » de cet exercice réjouissant, le « LSD » : « léger strabisme divergent, ou un regard tordu sur la peinture ».
« Réservant au peintre, la tâche sévère et contrôlable de commencer les tableaux, attribuons au spectateur le rôle avantageux, commode et gentiment comique de les achever par sa méditation ou son rêve. » Outre qu’il est toujours agréable de citer Félix Fénéon, cette phrase correspond bien à la règle de notre jeu. » Source: Des Papous dans la Tête: Les Décraqués – L’Anthologie, p 215
La « description objective » faite par Patrice Caumon de La Laitière de Vermeer, est en effet parfois objective (« une huile sur toile de 45 par 41 centimètres ») mais elle s’autorise quelques facéties ( » La jeune femme verse son lait tiède sur un muesli, elle a l’air cruche et en tient une… »), et va jusqu’à proposer une vision pour le moins iconoclaste du sujet ( « La laitière cache avec son corps volumineux une partie du sujet principal du tableau, sujet qui avait donné à l’œuvre son premier titre « Le Mur du fond » »)!
L' »interprétation » de Serge Joncour nous apprend qu’il s’agit du « premier vrai nu commis par le peintre, et il faut bien le dire, le seul »! Hélas, la longueur des temps de pose et les rigueurs de l’hiver obligeront le peintre à rhabiller son modèle et à renoncer à lui faire porter la jarre au-dessus de la tête. L’allégorie de la source devient ainsi La Laitière!
Proposition d’écriture: Choisir une œuvre dont on ne connaisse pas dans le détail (si possible) la genèse, ou du moins écarter cette influence pour laisser vagabonder l’imaginaire. Regarder cette œuvre avec un œil neuf, et à la façon de Serge Joncour ou Patrice Caumon, avec un « regard tordu ». Réinventer l’histoire, le sujet, le contexte du tableau, et en faire l’exposé à la première personne, avec l’autorité et la précision de l’expert.
En fonction de la longueur de l’atelier d’écriture et de la patience des participants, on peut proposer de traiter la partie « interprétation » seulement ou la « description objective » et l »interprétation ».