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Nos Ateliers d'écritures Oulipo

Atelier d’écriture Collection 2

Image Rue du Rendez-vous

A partir de ce point…

A partir de ce point… 30 minutes d’attente.

Un atelier d’écriture en deux temps, résolument antithétiques. La première partie consiste à  utiliser les ressources des slogans, inscriptions, textes répétés qui nous entourent et qu’on déchiffre inconsciemment sans les lire.

La deuxième partie met en exergue les sentences intimes, les leitmotivs au travers desquels on se raconte, les grandes scansions d’une histoire personnelle, l’ « avant », l' »après », les « moments »cruciaux.

Image Rue du Rendez-vous Première partie:

Imité du « perverbe », L’Affabuloir propose l’ « intrigan» : slogan étonnant constitué du début d’un slogan publicitaire et de la fin d’un autre.

Proposition d’écriture : Constituez une liste assez étendue de slogans publicitaires. Mélangez les slogans (et si cela s’y prête, les noms de marques !

Quelques exemples:

FN /IRI : Agitateur de / culottes courtes

CAR/TY: Le contrat /nommé désir…

LEROY MER/TOL: Les opticiens / prennent vie…

CI/TELLA : Il en faut de l’énergie / pour que le monde bouge…

VARIANTE: Le centon publicitaire donne des résultats assez intéressants. il suffit de feuilleter une revue et de relever les slogans publicitaires et signatures de marques et de les assembler en une sorte de « poème ».

Des extraits tirés du Livre de chroniques d’Antonio Lobo Antunes et d’Enregistrements pirates de Philippe Delerm (deux ouvrages qui abondent en ressources pour les ateliers d’écriture) révèlent les possibilités d’écriture ouvertes par les inscriptions (pancartes, avis, affichages règlementaires…) et leurs messages familiers et attendus, mais aussi les graffitis, déclarations personnelles qui s’offrent dans l’espace public et interrogent parfois le passant.

Extraits des textes supports

Proposition d’écriture: Partir d’une inscription, d’un graffiti, d’une pancarte, qu’un narrateur s’approprie. Celui-ci réagit, imagine, se souvient, exprime ses sentiments, son humeur… en utilisant le message comme un leitmotiv.

A partir d’une inscription, textes

Deuxième partie :

La Salle de Bains du Titanic, de Véronique Ovaldé est un texte énigmatique, construit comme la vie du personnage principal sur un retour perpétuel à un moment décisif, auquel se heurtent les désirs d’échapper. Vienna aimerait revenir « juste avant l’été où ».

La Salle de Bains du Titanic, extrait

Proposition d’écriture: Choisir un avant ou un après. Faire une liste pour essayer de définir un certain état, une façon de vivre, d’être au monde, comme une accumulation d’habitudes, de choses, d’impressions, sans hiérarchie ni ordre. Il n’est pas nécessaire de savoir ou de dévoiler quel est cet événement qui change tout.

Un avant ou un après, textes réalisés

Nos Ateliers d'écritures Oulipo

Atelier d’écriture « Collections » 1

L’Affabuloir consacrera l’année 2014 à la « collection », thème très riche qui évoque à la fois l’accumulation, l’abondance, la série, le multiple, et leurs contraires, à savoir la singularité, l’unique, le rare…

Ce premier atelier consacré à la collection s’intéresse aux litanies plus ou moins banales qui scandent le quotidien, ordonnancent les rapports humains, remplissent les conversations.

Un rien de prétention au-dessus du « Dictionnaire des idées reçues » se situe le « Catalogue des idées chic », dont la déclinaison contemporaines peut être aisément constituée en prêtant attention aux conversations dans les lieux et occasions où la pédanterie du moment s’exprime le plus couramment (laissons aux participants des ateliers d’écriture le soin de préciser la nature de ces lieux et occasions…).

Défense de l’esclavage.
Défense de la Saint-Barthélemy.
Se moquer des forts en thème.
Id. des savants.
Id. des études classiques.
Dire à propos d’un grand homme « Il est bien surfait ! » − Tous les grands hommes.
Et d’ailleurs, il n’y a pas de grands hommes. (…)
Raphaël, aucun talent.
Mirabeau, aucun talent.
Mais son père (qu’on n’a pas lu) oh !
Molière, tapissier des lettres.

Extrait du Catalogue des Idées chic, in Bouvard et Pécuchet, Gustave Flaubert (Ed. Le livre de Poche)

Proposition d’écriture: Proposer un catalogue des idées chic d’aujourd’hui (positions « originales », opinions décalées, indéfendables, refus des admirations en cours…)

Dans La Maladie de Sachs, Martin Winckler entrecoupe son récit des extraits de carnets du personnage principal, un médecin généraliste qui tente d’appréhender la matière brute des existences et des histoires auxquelles sa pratique le confronte chaque jour, en classant et répertoriant ces bribes d’humanité. Dans ces listes se déversent pêle-mêle des banalités affables, des récits de drames insoutenables, des aveux drôles ou émouvants, des demandes insolites…

A la question  » Qu’est-ce qui vous amène? », ses patients répondent diversement:

« Rien de neuf, que du vieux.
En tout cas, j’amène pas le soleil.
Ah, je me serais bien passé de venir.
Je vous amène ma mère, elle consultait un docteur à Tourmens mais elle ne veut plus le voir, elle s’est fâchée avec lui parce qu’il a voulu la faire opérer alors qu’elle ne voulait pas…(…)
Je venais juste vous dire que ma grand-mère est décédée avant-hier  et que les obsèques auront lieu demain.
Je venais pour vous montrer mon résultat d’examen. (…)
Je viens vous voir parce qu’on m’a parlé de vous, il paraît que vous savez très bien soigner l’asthme/la sinusite/les verrues/ les migraines/ la dépression / les rhumatismes / les furoncles/ les personnes âgées et que vous êtes très doux avec les enfants.
« 

Proposition d’écriture: Écrire un catalogue des petites phrases, échanges standardisés, recueil des plaintes, demandes, remarques, questions…Choisir une situation (au café, dans la file d’attente…), une profession (professeur, fleuriste, serveur…) ou une durée (ex : une journée).

Le bref roman de Laurent Quintreau, Marge brute, nous propose un « tour de table » à la façon des ouvertures de réunions. Ce tour de table est précisément celui des participants à une réunion interne, dont il nous livre le monologue intérieur, révélant toute la « violence des échanges en milieu tempéré » (pour reprendre le titre du merveilleux film de Jean-Marc Moutout).

 
 
 
 
 
 
 
« j’ai la nausée, j’ai encore trop mangé ce matin, je ne trouverai jamais un homme si je continue à me bâfrer comme une truie, je suis vide, heureusement il y a les copines, j’adore quand on s’appelle la nuit, avec Léa on a parlé jusqu’à 3 heures du mat, son mec l’avait plaquée, j’adore quand les copines se font plaquer, ce soir j’ai une répétition, tant mieux, le club de théâtre est vraiment sympa cette année, encore plus que l’année dernière, dommage qu’il n’y ait que des filles et des homos, je devrais peut-être faire de la gym, Rorty remercie Tissier, et se propose de continuer, après ces deux agréables digressions, de revenir aux sujets qui fâchent , la mission dont il a été chargé, à savoir la réorganisation de l’entreprise, moi je m’en fiche, je n’arrête pas de gagner des budgets, je rapporte au moins six fois mon salaire, charges comprises (…) »
Extrait de Marge Brute, Laurent Quintreau (Ed. 10/18)

Proposition d’écriture: Choisir une phrase, dans la liste constituée à partir de la proposition précédente. Écrire un monologue intérieur à partir de cette phrase. Donner de l’épaisseur au personnage, une histoire singulière, introduire dans le récit ces éléments de détails qui contribuent à incarner un personnage.

Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture « Petits détails » 1

Le petit détail révélateur est au centre de nombreux récits. Dans le genre policier, son rôle est primordial puisqu’il lui revient de faire basculer l’intrigue, point de départ de la mise à jour complète de la vérité.
Dans la nouvelle, il peut constituer cet épiphénomène qui déclenche la prise de conscience, la « crise » momentanée ou radicale.
Le petit détail révélateur représente surtout l’essence-même du travail d’observation, de la posture de l’écrivain par laquelle il s’attache à communiquer une perception particulière, plus précise ou inédite.

Première partie :

Pour ouvrir cet atelier d’écriture, on peut proposer de façon classique une liste à la manière de Sei Shōnagon (Notes de chevet) des fameux « détails qui tuent », ou de « petits détails qui gâchent tout ».
La proposition est susceptible d’être précisée à l’extrême ( par exemple : liste des « détails qui montrent que l’on est invité par obligation, bien que l’on s’efforce de nous démontrer le contraire… »).  Dans ce cas, les participants échangent entre eux des propositions de listes (rédigées sur de petits papiers), dont devront s’acquitter les destinataires.

Deuxième partie:

L’extrait suivant est tiré de l’excellent recueil de nouvelles de Quim Monzó, Mille Crétins (Ed. Jacqueline Chambon, 2009), qui, au-delà d’une lecture réjouissante, recèle bon nombre de petites pépites pour les ateliers d’écriture.

« C’est une table rectangulaire, sur un côté de la salle à manger. Une des femmes choisit une des chaises contre le mur et l’autre la place qui est en face d’elle. Les deux maris se retrouvent donc aussi face à face, mais du côté de l’allée.

Et alors qu’ils sont encore debout, en train d’enlever leurs vestes, sans faire exprès, une femme donne un coup de manche à une fourchette, la sienne, qui tombe par terre sans faire de bruit, parce bien qu’il y ait peu de monde dans la salle à manger la musique d’ambiance couvre tout, et qu’en plus on entend des voix qui viennent de la cuisine. La chute de la fourchette est passée inaperçue des trois autres personnes. (…) Si bien que la femme, d’un geste rapide,  se penche et ramasse la fourchette. Mais au lieu de la poser sur un coin de la table pour que le serveur la remplace par une fourchette propre, elle prend la fourchette de son mari, la met à la place de la sienne, et pose celle qu’elle avait ramassée par terre, à gauche de l’assiette de son mari, là où se trouvait celle qu’elle s’est appropriée.
(…) Pourquoi n’a-t-elle pas demandé au serveur de changer sa fourchette ? (…) Est-il moins regardant ? (…) Est-ce un échantillon de bien d’autres petites vengeances auxquelles elle se livre ? Est-ce qu’elle crache dans la tasse de café au lait de son mari, le matin, quand il regarde ailleurs ? »

Extrait de La Fourchette, in Mille crétins de Quim Monzó

Proposition d’écriture:

Choisir parmi les situations suivantes (ou en inventer une) un décor qui semble propice à la révélation, par un petit événement, un geste, une parole ou un regard, d’une vérité cachée. Le point de vue est externe, l’observateur-narrateur n’a pas accès à cette vérité cachée à propos de laquelle il produit des hypothèses.

Par la fenêtre d’une salle de classe
Un dimanche en famille
Sur la plage
A l’accueil d’une banque, ce que l’on aperçoit derrière la vitre…

Atelier Petits détails texte réalisé

Nos Ateliers d'écritures

Atelier d’écriture « Traces du passé »

Cet atelier d’écriture s’intéresse aux « traces du passé ». L’atelier propose de regarder ces traces de façon subjective, lorsqu’on convoque l’histoire intime, et avec une apparence de neutralité lorsque celles-ci sont examinées par l' »expert ».
Les exercices suscitent la nostalgie, mais aussi l’humour, en particulier si le choix des photographies invite à l’ironie…

Pas de texte support, mais il est possible de trouver de nombreux textes correspondant à ces consignes (par exemple Les Années, d’Annie Ernaux…).

Première partie:

Proposition d’écriture: Faire l’inventaire des objets disparus, en y mêlant ceux que le progrès a injustement condamnés, ceux qu’il a fallu abandonner en grandissant, ceux qu’on a prêtés, oubliés, égarés…

Dire en une phrase ce qu’ils représentent pour nous : utilité, source de sentiments divers (agacement, attendrissement…) caractéristiques ou souvenir.

Caisse d'objets anciens

Exemples :

La tapette à mouches de ma grand-mère, sceptre plastique toujours brandi, impitoyable instrument de sa dextérité…
le magnétophone, machine à faire nasiller les voix adolescentes, conservateur peu scrupuleux de tous les bruits de fond;
les petites vignettes de tissu, à coudre ou à « transférer » sur un jean délavé, dont l’accumulation faisait ressembler le porteur à un article plusieurs fois soldé;
la tortue en plastique qui flottait dans mon bain,
le couvre-lit à franges, dont le relief dessinait de petites vaguelettes,
les pyjamas en éponge, déformés aux genoux,
le panier à salade de ma grand-mère, à secouer dans de grands moulinets de bras, objet non citadin par définition, sauf à éclabousser les passants dans un rayon de plusieurs mètres…

Proposition d’écriture: Choisir un des objets et en faire l’hommage funèbre, en quelques lignes. Utiliser les poncifs du genre : dire en quoi il est regretté, énoncer un petit travers qu’on lui pardonne, lister ses qualités.

Deuxième partie:

Choisir trois à quatre photographies de presse et de publications institutionnelles, concernant des événements d’importance et de thématiques variées (politique, social, people…). A partir de ces photographies, faire la proposition d’écriture suivante:

Proposition d’écriture: Un de ces clichés, témoignage de notre civilisation, a été retrouvé miraculeusement et étudié par des historiens.  Il fait l’objet d’interprétations diverses. Rédiger au choix:

– Un article savant : texte descriptif de 10-15 lignes exposant une « lecture » savante de l’image
– Un article de presse : un petit article de presse locale ou nationale  raconte la trouvaille et résume les controverses à propos de ce document d’archives exceptionnel.

atelier interminable Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture interminable, Capital culturel – 4

Atelier d’écriture interminable, Capital culturel, texte n° 4

L’atelier d’écriture se caractérise par un temps volontairement limité. Mais la proposition d’écriture peut s’émanciper de son cadre d’atelier pour devenir chantier d’écriture. Et, pourquoi pas, consigne obsessionnelle, espace réitératif jusqu’à complet dévoilement.

Je propose une consigne, et une tentative de traitement.

Proposition d’écriture : écrire sous forme de listes commentées le roman d’un échec.

CAPITAL CULTUREL

Texte n°4, perspective d’un semblant d’action, mais non finalement…

L’enfant est maintenant retranché dans un coin du tapis, entièrement livré à une épopée discrète qu’il récite pour s’en enivrer. L’aventure inclut apparemment la torture d’un insecte que je ne distingue pas, mais je connais la concentration particulière qui accompagne ces expériences méthodiques et passionnées. Je me souviens en particulier de l’opération de  décapitation d’une mouche, phase finale d’une batterie de tests raffinés que le coffret d’accessoires d’un microscope avaient inspirés (teinture des ailes, application de colle, section de pattes, etc.). Il murmure gentiment à cette petite bête le détail de son supplice tout en arrachant ses ailes ou autre chose avec un joyeux sentiment de toute-puissance.

La mère n’a pas vu l’insecte, et nous épargne dans l’ordre :

1)      cri

2)      rappel du règlement

3)      lavage des mains de l’enfant

4)      reproche au père

5)      exposé comparatif des plans de charge respectifs des membres du couple parental

6)      proclamation exaspérée d’une impuissance à se dédoubler (référence répétée à une divinité hindoue à l’appui)

Soit un épisode désagréable et inintéressant de vingt minutes au minimum.

Lire le texte 3

atelier interminable Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture interminable, Capital culturel – 3

L’atelier d’écriture se caractérise par un temps volontairement limité. Mais la proposition d’écriture peut s’émanciper de son cadre d’atelier pour devenir chantier d’écriture. Et, pourquoi pas, consigne obsessionnelle, espace réitératif jusqu’à complet dévoilement.

Je propose une consigne, et une tentative de traitement.

Proposition d’écriture : écrire sous forme de listes commentées le roman d’un échec.

CAPITAL CULTUREL

Texte n°3, on avance à peine…

Ceux-là sont allés à l’université, suffisamment pour produire sur tout énormément de discours argumenté, pas assez pour échapper à la tiède pitance des revues. Mais je veux bien, sur ce divan, venir goûter la dernière tambouille accommodée par l’air du temps.

1) Parce que je rattrape chez eux mon retard en matière d’idées contemporaines moyennes des classes éduquées.

2) Parce que le regard porté sur l’humanité n’y déroge pas à la bienveillance (additif du corpus qu’ils ont absorbé inconsciemment, avec leur ration de théories simplifiées pour l’industrie universitaire).

3) Parce que la contrepartie affective me semble très honnête. On s’interrompt à peine dans ses activités pour m’ouvrir la porte, on me sert un café réchauffé dans un vieux mug fêlé : j’appartiens au cercle étroit des amis confirmés.

4) Parce qu’on y lisse, par manque d’attention, mais peut m’importe, les variations de mes états : on m’apaise sans le savoir.

J’étends les jambes et j’écoute tranquillement les vertus de la Paternité, que l’homme étale avec un enthousiasme réel où l’on retrouve aussi bien la joie de la trouvaille que la conviction inusée du converti. Je l’écouterais me parler de son intérêt pour le culte druidique et le tatouage intégral avec la même considération, et absence de considération. Va pour la Paternité et les sous-thèmes : Paternité et sens de la responsabilité, Paternité et découverte de la clairvoyance enfantine, Paternité et dialogue… Ca commence grandes valeurs, et ça retombe vite, en Paternité et quête interminable de garde d’enfants, Paternité et prix des chaussures en taille 28…

En effet, ils ont chez eux cet enfant qui leur appartient et dont ils m’entretiennent avec régularité au moyen d’indicateurs chiffrés que je m’efforce de retenir, peut-être avec une vague crainte d’être interrogée un jour. Je l’ai connu embryon alors que sa fragile présence tenait à quelques semaines d’aménorrhée, puis fœtus, à travers kilos accumulés, taille de bonnets de soutien-gorge et fréquence de coups de pieds nocturnes, enfin nourrisson, converti en durées de sommeil et diverses courbes comparées.

Malgré l’abondance des données fournies, en l’absence de lien acquis par parenté ou heures de babysitting, il n’entre pas dans la catégorie des « mineurs familiers à lancer en l’air avec des cris ou à gratifier de chatouilles ». A mon arrivée tout à l’heure, on lui a commandé un bonjour dont il s’est acquitté tout de suite, je me suis penchée vers le petit visage pour recevoir, sous l’œil, un baiser rapide et mal fichu : formalités réglées.

Lien vers le texte 2

atelier interminable Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture interminable, Capital culturel – 2

L’atelier d’écriture se caractérise par un temps volontairement limité. Mais la proposition d’écriture peut s’émanciper de son cadre d’atelier pour devenir chantier d’écriture. Et, pourquoi pas, consigne obsessionnelle, espace réitératif jusqu’à complet dévoilement.

Je propose une consigne, et une tentative de traitement.

Proposition d’écriture : écrire sous forme de listes commentées le roman d’un échec.

CAPITAL CULTUREL

Texte n°2, toujours le début…

Mauvais jour. Pour m’oublier, je me transporte chez des gens de grand bruit, capables d’étouffer les individualités chétives sous la somme brutale de leurs existences mises en mots.

Couple d’amis : êtres indissociables à apprécier de façon dissociée, rarement amis entre eux.

Accueil agréable en cette fin d’après-midi, la configuration est de bonne augure quoique attendue, sinon caricaturale : la partie féminine du couple d’amis à la cuisine / la partie masculine du couple d’amis au salon. J’en déduis que l’hystérique étant occupée, et l’atone disponible, la situation présente une faible potentiel de tension.

J’investis avec gratitude un divan pour une conversation sans affects. J’accède tranquillement aux échanges protocolaires d’ouverture, évaluation synthétique en une phrase maximum de l’état physique et psychique de quelques personnes de  nos entourages respectifs et communs.

Maîtrisant bien les usages de ce micro-groupe, j’ouvre ensuite à l’hôte masculin la possibilité d’exposer  le credo ostentatoire de la période en cours,  lequel va mobiliser toutes ses neurones et son énergie pour une durée qui varie généralement d’une semaine à quelques mois. Je le fais par pure courtoisie puisque je m’y intéresse faiblement, mais cela me coûte peu de l’y engager: il suffit de commencer n’importe quelle phrase par une expression du type « Tu as vu… » ou « Tu as remarqué… » pour qu’il déroule son concept-clé d’un air exalté.

Il a ainsi investi successivement toute sa capacité de certitude dans:

–          le régime instinctif

–          les constellations familiales

–          les explications anthropologiques des différences entre les sexes (l’homme à la chasse, la femme à la caverne, etc…)

–          la neuropsychologie

–          le feng shui

–          l’extraordinaire potentiel du marché chinois

–          la micro-nutrition

–          la fin de l’Histoire

Pour lire le texte précédent: Capital culturel, texte 1

Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture « Patrimoine culturel »

A l’approche des Journées du patrimoine, cet atelier thématique se propose de créer son petit Panthéon personnel, d’imaginer, avec plus ou moins de férocité la propagande touristique de demain, ou encore de revendiquer une vision quelque peu « divergente » de l’histoire de l’art.

L’occasion de s’amuser un peu avec nos classiques.

Première partie:

Support : Les Phares, Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal (1857)

Proposition d’écriture: Sous la forme  d’une série plus ou moins longue de petits paragraphes de trois à quatre lignes, lister ses admirations (ou ses mépris) littéraires; célébrer (ou dénigrer) les auteurs en reprenant la structure du poème de Baudelaire. Commencer chaque paragraphe par un nom, puis y accoler plusieurs appositions en tentant de développer une métaphore pour chacun. Cette image doit représenter une vision personnelle de l’univers de cet auteur ( différente des qualités et caractéristiques qui lui sont d’ordinaire attribuées, ou non). Afin de conserver une unité au poème , il est préférable de choisir les métaphores dans une même catégorie (lieu, monde végétal ou animal…).

Deuxième partie:

Support: un prospectus des « Journées européennes du Patrimoine » édité par la ville de son choix.

Proposition d’écriture: Imaginer le prospectus des Journées du Patrimoine de 2050, en s’inspirant des différentes rubriques du modèle proposé. Imaginer la toponymie, l’héritage culturel et architectural considéré comme digne d’intérêt, les choix et l’état de conservation des bâtiments, les œuvres exposées et les animations proposées…

Cette proposition d’écriture n’inspire pas immédiatement tous les participants. Le choix d’un modèle à la fois simple et suffisamment détaillé est important pour constituer une base. En fonction du monde imaginé en 2050, on peut proposer une simple transposition de chaque partie du prospectus, et fournir un exemple.

Troisième partie

Support: Des Papous dans la Tête: Les DécraquésL’Anthologie, coll., Ed. Gallimard (2004), p 215- 217 ; reproductions de plusieurs chefs-d’œuvre extrêmement célèbres

Petit emprunt aux »décraqués » de cet exercice réjouissant, le « LSD » : « léger strabisme divergent, ou un regard tordu sur la peinture ».

« Réservant au peintre, la tâche sévère et contrôlable de commencer les tableaux, attribuons au spectateur le rôle avantageux, commode et gentiment comique de les achever par sa méditation ou son rêve. » Outre qu’il est toujours agréable de citer Félix Fénéon, cette phrase correspond bien à la règle de notre jeu. »      Source: Des Papous dans la Tête: Les DécraquésL’Anthologie, p 215

La « description objective » faite par Patrice Caumon de La Laitière de Vermeer, est en effet parfois objective (« une huile sur toile de 45 par 41 centimètres ») mais elle s’autorise quelques facéties ( » La jeune femme verse son lait tiède sur un muesli, elle a l’air cruche et en tient une… »), et va jusqu’à proposer une vision pour le moins iconoclaste du sujet ( « La laitière cache avec son corps volumineux une partie du sujet principal du tableau, sujet qui avait donné à l’œuvre son premier titre « Le Mur du fond » »)!

L' »interprétation » de Serge Joncour  nous apprend qu’il s’agit du « premier vrai nu commis par le peintre, et il faut bien le dire, le seul »! Hélas, la longueur des temps de pose et les rigueurs de l’hiver obligeront le peintre à rhabiller son modèle et à renoncer à lui faire porter la jarre au-dessus de la tête. L’allégorie de la source devient ainsi La Laitière!

Proposition d’écriture: Choisir une œuvre dont on ne connaisse pas dans le détail (si possible) la genèse, ou du moins écarter cette influence pour laisser vagabonder l’imaginaire. Regarder cette œuvre avec un œil neuf, et à la façon de Serge Joncour ou Patrice Caumon, avec un « regard tordu ». Réinventer l’histoire, le sujet, le contexte du tableau, et en faire l’exposé à la première personne, avec l’autorité et la précision de l’expert.

En fonction de la longueur de l’atelier d’écriture et de la patience des participants, on peut proposer de traiter la partie « interprétation » seulement ou la « description objective » et l »interprétation ».

La Tour de Babel

Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture « La nuit d’avant, la nuit d’après »

Ce thème très riche m’a été inspiré par le beau livre d’Emmanuel Carrère, D’autres vies que la mienne. Il s’articule autour de ces temps forts qui font basculer l’existence. Des vies s’arrêtent et d’autres continuent, marquées par des drames, des changements brutaux qui en modifient radicalement le cours. Le livre est bien plus riche, mais D’autres vies que la mienne m’a laissé le souvenir d’un récit reliant deux nuits, l’une, angoissée, terrifiante, qui s’ouvre sur une victoire (mentale) sur la maladie; l’autre, bouleversante, exténuante au point de paraître interminable malgré une écriture ramassée, qui est la dernière nuit.

Il est plus fréquent d’écrire « le jour où »… Cependant, la nuit dans son silence et sa solitude, nourrit les anticipations angoissées, laisse défiler les images traumatiques, réécrit parfois les frustrations de la journée. Ce temps du retour à soi, qui « précède » ou qui « succède à », amplifie l’émotionnel, modifie nos perceptions. Il s’y cache de petites terreurs, des vérités inavouables, de grandes prises de conscience qui peut-être, n’auront plus le même pouvoir au lever du jour. La nuit est, parfois, une grande traversée entre un jour, et son lendemain décisif, lorsque plus rien ne sera comme avant…

Première partie:

Dans cette première partie, il s’agit de poser le décor avant d’y installer l’histoire, de convoquer les souvenirs et les images qui se rattachent à la nuit. Inventorier, à la façon de Perec, les environnements divers de nos nuits dans un temps d’écriture court, de cinq à dix minutes.

Proposition d’écriture:

1)Ecrire la liste des lieux où l’on a dormi, rapidement, sans réfléchir; ne donner qu’une indication brève. Ne pas classer, chercher à dérouler un inventaire le plus exhaustif possible.

2) Choisir un lieu dans la liste et en faire une description brève, sans faire de phrases complètes, sous la forme d’une prise de notes. Ne donner aucun détail d’ordre biographique, décrire le lieu à la façon d’un observateur objectif.

Rassembler les descriptions : il est possible de les plier et de les mettre dans un chapeau, ou de les afficher afin que chacun puisse les lire. Chacun des participants de l’atelier d’écriture devra écrire à partir de la description produite par un autre.

Proposition d’écriture : A partir de la description, essayer de dégager une impression dominante, une ambiance, une tonalité du lieu qui deviendra tonalité du récit. Imaginer celui ou celle qui y couche ou va s’y installer, son état d’esprit, sa situation, donner une couleur à l’instant, faire le lien entre ce lieu,  le personnage, le moment. Faire habiter ce lieu.  Écrire un petit récit d’une dizaine de lignes.

Deuxième partie:La « nuit d’après »

Support : D’autres vies que la mienne, Emmanuel Carrère (Ed. POL ), p 121 à 123 de  » Les visites, la présence des familles … à … nous n’en n’avons pas fini avec la première nuit. »

Extrait: « Les visites, la présence des familles ne sont autorisées que jusqu’à huit heures.  Etienne reste seul dans sa chambre d’hôpital. On lui a donné à dîner, un cachet pour l’aider à dormir, bientôt on éteint la lumière. Il fait nuit. C’est la première nuit, celle dont il a parlé le jour de notre rencontre, et qu’il essaie cette fois, parce c’est important, très important de me raconter en détail. »

Proposition d’écriture : Imaginer la « première nuit après … » rendue particulière par une annonce, une rencontre, un événement, et dominée par un sentiment (peur, abandon, amour…). Cette nuit est une nuit de solitude absolue. Une métaphore, une image, une association, doit traverser le récit comme un fil rouge, en synthétiser une impression d’ensemble. Écrire un récit à la première personne, au passé ou au présent.

Propositions: la nuit d’après mes dix-huit ans, la nuit d’après mon prix littéraire, ma légion d’honneur, la nuit d’après l’adoption de mon hamster, la nuit d’après mon changement de sexe, la nuit d’après mon coup d’état…

GIGI, texte

Troisième partie:La « nuit d’avant »

Support: Léonard Michaels, Le Club, Christian Bourgeois Editeur (2010) / Jean-Marie Laclavetine, Mouches noyées, in Le Rouge et le Blanc, Ed. Gallimard (1994)

Après la nuit, extraits de textes

Proposition d’écriture : Choisir l’un des extraits. Imaginer ce que fut cette nuit, mais n’en retenir qu’un élément, un épisode, un moment de cette totalité complexe dont chacun des deux textes est le « résultat ». Se focaliser sur un personnage, un détail. Du tableau d’ensemble, reconstituer une partie seulement dans un texte bref, de cinq à dix lignes. Renoncer absolument à tout expliquer ! Le récit sera conçu de façon à pouvoir s’insérer (reprendre le type de narration, les temps verbaux) dans le texte dont est tiré l’extrait.

Kramer et le vaisselier

atelier interminable Nos Ateliers d'écritures Récit

Atelier d’écriture interminable, Capital culturel – 1

L’atelier d’écriture se caractérise par un temps volontairement limité. Mais la proposition d’écriture peut s’émanciper de son cadre d’atelier pour devenir chantier d’écriture. Et, pourquoi pas, consigne obsessionnelle, espace réitératif jusqu’à complet dévoilement.

Je propose une consigne, et une tentative de traitement.

Proposition d’écriture : écrire sous forme de listes commentées le roman d’un échec.


CAPITAL CULTUREL

N°1 : Conventionnellement désigné comme « le début »

–          Cuisses lourdes

–          seins petits et très hauts

–          bras trop longs

–          jambes trop courtes

–          cheveux secs

–          fesses molles.

Tu n’es pas une vraie fille avec au moins quelques attributs gracieux à défaut d’être belle, mais un être taré avec des bas qui plissent, un col mal roulé, des cheveux imprévisibles, une couleur agressivement désaccordée avec l’air du temps. Tu scrutes l’infirmité de ta silhouette dans le rendu cru des miroirs. Il y aura, dans l’assemblage, un détail malheureux, une tache quelque part.

Ce que tu sais de toi représente l’ampleur de ce qui demeure à cacher.

Faire l’amour : suite d’esquives savantes.

Parler : bruit abondant,  dérèglement qui étourdit, où l’agité des mains fournit un paravent à l’épaisseur du visage.

Les définitions dont tu as construit le monde t’épuisent en gesticulations qui s’observent. Entre ces calculs, l’intervalle de vie où tu respires, ce sont ces passivités bienheureuses : lire, regarder les autres s’accommoder de leur espace, accumuler les émotions fades de la télévision, rester à température.

S.H.